top of page

Le train va assez vite

Les signaux aiguilles et passages à niveau fonctionnent comme en Angleterre
La nature est d’un vert beaucoup plus foncé que chez nous

Cuivrée

Fermée

La forêt a un visage d’indien

Tandis que le jaune et le blanc dominent dans nos prés

Ici c’est le bleu céleste qui colore les campos fleuris

Échappées sur la mer

Chutes d’eau

Arbres chevelus moussus

Lourdes feuilles caoutchoutées luisantes

Un vernis de soleil

Une chaleur bien astiquée

Reluisance

Des deux côtés du train toute proche ou alors de l’autre côté de la vallée lointaine

La forêt est là et me regarde et m’inquiète et m’attire comme le masque d’une momie

Je regarde

Pas l’ombre d’un œil

Hollande Hollande Hollande

Fumée plein le fumoir

Tziganes plein l’orchestre

Fauteuils plein le salon

Familles familles familles

Trous plein les bas

Et les femmes qui tricotent qui tricotent

partir.jpg

L’air est froid

La mer est d’acier

Le ciel est froid

Mon corps est d’acier

Adieu Europe que je quitte pour la première fois depuis 1914

Rien ne m’intéresse plus à ton bord pas plus que les émigrants de l’entrepont juifs russes basques espagnols portugais et saltimbanques allemands qui regrettent Paris

Je veux tout oublier ne plus parler tes langues et coucher avec des indiens et des indiennes des animaux des plantes

Et prendre un bain et vivre dans l’eau

Et prendre un bain et vivre dans le soleil en compagnie d’un gros bananier

Et aimer le gros bourgeon de cette plante

Me segmenter moi-même

Et devenir dur comme un caillou

Tomber à pic

Couler à fond

Aujourd’hui je suis peut-être l’homme le plus heureux du monde

Je possède tout ce que je ne désire pas

Et la seule chose à laquelle je tienne dans la vie chaque tour de l’hélice m’en rapproche

Et j’aurai peut-être tout perdu en arrivant

bottom of page